La Spirale Dynamique : Introduction

Un monde en recomposition

« Tandis que notre planète, obéissant à la loi fixe de la gravitation, continue à tourner dans son orbite, une quantité infinie de belles et admirables formes, sorties d’un commencement si simple, n’a pas cessé de se développer et se développe encore ! »
Charles Darwin

Le grand enchevêtrement

La caractéristique majeure de ce début du XXIe siècle est la cohabitation étroite de différents systèmes de valeurs issus de multiples cultures. Dans le monde. Au sein de chaque pays. À l’intérieur de chaque entreprise. Au cœur de chacun d’entre nous.

La technologie moderne et les réseaux informatiques à grande vitesse ont rétréci la planète. Le monde entier tient sur un bureau. Un ordinateur standard a communément été commandé sur l’Internet à une entreprise américaine, monté en Irlande à partir d’un processeur fabriqué au Costa Rica, de mémoire sortie d’une usine allemande, d’un disque dur construit au Philippines, d’un clavier de Taïwan et d’un écran plat venant du Japon. La facture peut avoir été émise par une société de comptabilité indienne, et les appels au service après-vente traités par un call center installé au Maroc.

Thomas L. Friedman, grand éditorialiste au New York Times, en a déduit dans un livre fameux portant ce titre que « la terre est plate », c’est-à-dire qu’à tout moment chaque être humain peut se connecter immédiatement à n’importe quel autre pour monter un projet commun, indépendamment de l’endroit de la planète où il se trouve.

Bien évidemment, la terre n’est pas plate, et Thomas Friedman tombe dans ce que James Mann, un spécialiste des relations sino-américaines, appelle « l’illusion Starbucks » : « Dès que des gens mangent chez McDonald’s ou s’habillent chez Gap, les journalistes en déduisent hâtivement qu’ils sont en train de devenir comme nous. » En réalité, chaque groupe humain perçoit sa culture comme un moyen de protéger son identité, et l’attachement aux valeurs qu’elle défend est de plus en plus fort.

Le même phénomène se manifeste dans chaque pays. En se promenant dans les rues d’une ville importante, on peut constater combien la diversité culturelle s’accroît chaque jour. Des populations de toutes origines s’y croisent, achètent des produits venant du monde entier et dînent dans des restaurants présentant toutes les cuisines du monde.

Toute grande entreprise peut faire un constat semblable. Le modèle de management unique ne fonctionne plus tant l’hétérogénéité du personnel est importante. Les attentes de chacun sont différentes. Telle personne veut un encadrement présent et fort, et telle autre un maximum d’autonomie ; telle personne est motivée par des récompenses financières, et telle autre par un sentiment d’appartenance ; telle personne souhaite une relation durable et loyale avec son entreprise, et telle autre est connectée à sa fonction. La liste pourrait occuper des pages.

Individuellement, nous sommes le théâtre des mêmes oppositions de valeurs. En tant que consommateurs, nous voulons les produits les moins chers possibles, mais en tant que travailleurs, nous réclamons des salaires élevés et des emplois stables et non délocalisés. Nous aimerions pouvoir faire des achats à n’importe quelle heure du jour et de la nuit, mais nous répugnons à bouleverser nos horaires de travail afin de préserver notre vie familiale. Nous souhaitons que nos enfants respectent les règles que nous leur fixons, mais nous les voulons indépendants et autonomes. Nous sommes concernés par la menace écologique qui pèse sur le monde, mais, voiture, informatique ou télévision, nous sommes tentés par des produits énergivores. Là aussi, il serait facile d’allonger cette énumération.

La grande illusion

La terre plate de Thomas Friedmann n’est que le dernier avatar d’une utopie très ancienne. Depuis toujours, l’être humain caresse le fantasme de l’unification du monde sous un système de valeurs unique. Ainsi après l’effondrement du mur de Berlin, Francis Fukuyama, un philosophe et chercheur en sciences politiques américain, a proclamé « la fin de l’histoire ». Il voyait dans la Guerre froide le dernier combat idéologique, et dans sa fin un consensus définitif autour des valeurs de la démocratie libérale.

Déjà en 1962, dans La Galaxie Gutenberg, Marshall MacLuhan formulait la fameuse métaphore du village global. Or le monde n’est pas un village. Dans un village, tous les habitants partagent peu ou prou le même modèle du monde, le même style de vie et les mêmes valeurs. Si la population mondiale était réduite à un village de cent habitants, 42 personnes n’auraient pas accès à l’eau potable, 33 vivraient une situation de guerre, 40 ne sauraient pas lire, écrire et compter, 1 serait riche et posséderait la moitié du village, 80 pratiqueraient une religion dont 40 y seraient contraints, 5 seulement seraient déjà parties en vacances, etc.

La contraction de la terre a abouti à ce que des systèmes profondément différents qui étaient autrefois largement séparés sont désormais au contact quotidien les uns des autres. Rien ne laisse penser que cette situation puisse changer.

Il en est de même à tous les autres niveaux de regroupement des êtres humains. Les flux migratoires vont continuer à augmenter, et dans les pays, les villes et les entreprises, la mixité des valeurs restera la norme aussi loin qu’on puisse imaginer l’avenir.

Sur le plan individuel enfin, toutes les recherches actuelles des neurosciences confirment que le cerveau humain est un organe profondément modulaire. Cela implique qu’il n’y a pas une localisation centralisée de la conscience et que le sentiment subjectif d’une identité unique et cohérente est une construction a posteriori. En nous aussi, la multiplicité des systèmes de valeurs va perdurer.

Un monde stratifié

Que nous le voulions ou non, nous sommes donc confrontés durablement à la diversité des valeurs, et il est de notre intérêt de l’accepter, de la comprendre et d’apprendre à vivre opérationnellement avec elle. C’est l’objet de ce livre.

Cette multiplicité des modèles du monde est certes source de complexité, mais elle est avant tout une chance. Il est impossible de se tromper tout le temps ! Chaque système de valeurs existant, aussi étrange puisse-t-il nous paraître, est porteur d’aspects positifs et de solutions qui peuvent se révéler utiles dans des circonstances particulières.

Même si en ce domaine chaque individu est unique, il existe des structures communes qui permettent d’appréhender les fondamentaux d’un système de valeur de manière concrète et de percevoir les éléments clés qui sous-tendent nos actes, nos pensées et nos certitudes.

Le temps des solutions uniques est révolu. La prise de conscience de l’hétérogénéité du monde et des êtres permet d’appliquer à chaque ensemble de valeur la réponse la plus appropriée pour lui-même, pour nous et notre environnement. Dans cet ouvrage, nous allons découvrir comment cartographier et utiliser la diversité des systèmes de valeurs. Après un premier chapitre qui décrit le modèle de la Spirale Dynamique et montre comment êtres humains et sociétés développent des systèmes de valeur leur permettant de s’adapter à leurs conditions de vie, viennent quatre parties :

  • La première partie présente les huit systèmes de valeur connus à ce jour, leurs caractéristiques, leurs objectifs, leur style de communication, leur influence dans notre développement, leurs manifestations dans la vie privée, en entreprise et dans le monde.
  • La deuxième partie expose l’impact du modèle de la Spirale Dynamique sur le changement individuel et collectif. Elle étudie la nécessité ou non du changement, ses préalables, ses conditions et son déroulement.
  • La troisième partie montre comment auto-évaluer son positionnement sur la Spirale Dynamique et comment interpréter le résultat obtenu.
    Elle s’appuie sur les réponses aux brefs exercices proposés dans les deux parties précédentes et gagne en efficacité si ceux-ci sont faits au fur et à mesure de la lecture.
  • La quatrième partie présente des utilisations de la Spirale Dynamique dans un contexte d’évolution personnelle, en entreprise, au niveau d’un pays, et pour des applications de gouvernance sociale et organisationnelle.

Afin de faciliter la lecture et la mémorisation, chaque partie débute par une présentation générale, suivie de chapitres descriptifs ou explicatifs. Chaque chapitre ou sous-chapitre commence à son tour par une description globale de son contenu et se termine par un récapitulatif qui en résume les points clés.

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